Bonjour,

Recherche rapide

Menu recherche

Bienvenue sur Alexandrie !

Article
La cocaïne et les ivresses progressent en France , Quotidien du médecin (Le) , 30/06/2011
Type Article
Titre La cocaïne et les ivresses progressent en France
Source Quotidien du médecin (Le)
Date de parution 30/06/2011
Commentaire Stabilisation de la consommation de cannabis, recul de l’ecstasy mais hausse de la cocaïne, baisse continue de la consommation quotidienne d’alcool mais augmentation des ivresses, tels sont les principaux enseignements du nouveau volet du Baromètre santé 2010 consacré aux usages de substances psychoactives des Français adultes. Près d’un tiers des Français de 18 à 64 ans déclare avoir consommé du cannabis durant sa vie. Davantage expérimenté par les hommes que les femmes (41 % contre 25 %), ce produit n’a pas vu sa consommation s’envoler ces dernières années. Tout comme en 2005, la part des personnes ayant consommé du cannabis en 2010 s’élève à environ 8 %. Bien que l’expérimentation de cannabis soit passée de 29 à 33 % entre 2005 et 2010, cette « légère hausse observée est mécanique, liée à un effet de stock des générations anciennes de fumeurs, dans la mesure où les autres formes d’usage (régulier, dans l’année ou quotidien) apparaissent stables », commente l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) qui publie, avec l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), le dernier volet du Baromètre santé 2010 sur la consommation de substances psychoactives des adultes. Les nouveaux chiffres de la consommation de drogues chez les mineurs sont attendus pour le mois d’octobre. Touchant dix fois moins de personne que le cannabis, la cocaïne est le deuxième produit illicite le plus consommé en France, expérimentée par 3,8 % des 18-64 ans (contre 2,5 % en 2005, année du précédent Baromètre). « La hausse de sa diffusion est néanmoins très nette, traduisant la démocratisation d’un produit autrefois circonscrit à des catégories aisées et qui touche, depuis quelques années, des sphères de plus en plus large de la société », souligne l’OFDT. A contrario, la consommation d’ecstasy semble marquer le pas. L’usage régulier du produit durant l’année 2010 recule à 0,3 % (contre 0,5 % en 2005). L’expérimentation s’élève à 2,7 % en 2010 contre 2 % en 2005 mais cette augmentation traduit à l’instar du cannabis un « effet de stock » des anciennes générations de consommateurs. Parmi les autres produits illicites, le Baromètre 2010 montre une légère hausse de l’expérimentation d’héroïne (1,2 %, contre 0,9 % en 2005) et de celle de champignons hallucinogènes (3,2 contre 2,7 %). S’agissant de l’alcool, le Baromètre confirme la tendance d’« une baisse significative des consommations quotidiennes » (12 contre 16 %) parallèlement à une augmentation des épisodes d’ivresse (19 contre 15 %). « L’ampleur de la hausse a été plus importante chez les jeunes de 18 à 34 ans, et en particulier chez les jeunes femmes de 18 à 25 ans », avec une consommation ponctuelle de quantités importantes de boissons alcoolisées passée de 30 à 42 %. Poppers interdits. Pour le tabac, si la part de fumeurs quotidiens progresse (30 contre 28 %) « le nombre moyen de cigarettes, ou équivalent cigarettes, fumées quotidiennement par les fumeurs réguliers est en recul » (13,8 contre 15,3). Là encore, la hausse de consommation est surtout visible chez les femmes (+4 % entre 2005 et 2010). La progression la plus nette concernant les femmes de 45 à 64 ans (+6 %). Lors de la présentation du Baromètre, Étienne Apaire, président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et toxicomanies (MILDT) a annoncé que les poppers allaient être prochainement totalement interdits. Bien qu’ils ne soient pas considérés comme stupéfiants, les poppers ne seront plus accessibles au public sauf s’ils sont prescrits par ordonnance. Selon le Baromètre santé, la consommation de ces produits a progressé de 3,9 à 5,3 % entre 2005 et 2010. La mission parlementaire sur les toxicomanies a par ailleurs remis ce mercredi son rapport, qui ne recommande pas la dépénalisation du cannabis, considérée comme « une impasse éthique et juridique ». Quant aux centres supervisés d’injection de drogue, les rapporteurs de la mission vont dans le sens du gouvernement, qui s’oppose à leur expérimentation.
Fermer Fermer
Article
L’addiction à la cocaïne , Quotidien du médecin (Le) , Karila L , 18/02/2010
Type Article
Titre L’addiction à la cocaïne
Source Quotidien du médecin (Le)
Auteurs Karila L
Date de parution 18/02/2010
Commentaire La cocaïne est, en 2009, la seconde drogue illicite la plus consommée en Europe après le cannabis. Selon le rapport de l’Observatoire européen des drogues et de la toxicomanie (OEDT), la prévalence de la consommation de cocaïne en population générale, chez les Européens âgés de 15-64 ans, est sur la vie de 3,9 %, sur l’année écoulée de 1,2 % et sur le mois écoulé de 0,4 %. Les 15-34 ans de sexe masculin sont le groupe le plus touché par ce problème. L’expérimentation de cocaïne (en avoir consommé au moins une fois) chez les jeunes de 17 ans est de 4 % en Île de France, selon l’Observatoire français des drogues et de la toxicomanie (OFDT). Cette donnée est inquiétante car ce département est loin devant les autres et la consommation de cette substance est en progression constante en France. Différentes formes La cocaïne existe sous différentes formes (chlorhydrate de cocaïne ou poudre?; cocaïne base (crack, freebase) ou cailloux). Elle se consomme par voie intranasale (voie la plus populaire), se fume (cocaïne base) ou s’injecte par voie intraveineuse (phénomène plus rare). Les effets psychoactifs de cette drogue varient en fonction de la dose consommée, de la voie d’administration (les voies intraveineuses et fumée sont identiques sur le plan pharmacocinétique et les plus rapides d’action) et des individus. La population de sujets consommant de la cocaïne est très hétérogène. Elle comprend d’une part des sujets non dépendants regroupant des usagers occasionnels, des usagers compulsifs, des abuseurs de cocaïne et d’autre part des sujets dépendants. Les trajectoires de consommation sont marquées par une discontinuité sauf pour les sujets sévèrement touchés par cette addiction. Profil type Le profil type du patient qui vient consulter au Centre d’enseignement, de recherche et de traitement des addictions (www.centredesaddictions.org), à l’hôpital Pau-Brousse de Villejuif est le suivant : sex-ratio hommes/femmes de 5/1?; âge de début de la consommation entre 15 et 24 ans?; âge moyen de la dépendance à 31 ans?; voie intranasale prédominante suivie de la voie fumée?; meilleure insertion sociale des usagers par voie intranasale comparée aux fumeurs de cocaïne base. Ces données épidémiologiques et cliniques sont proches de celles retrouvées par l’OEDT. Elles contrastent avec les résultats de l’enquête NEMO, réalisée en Martinique et publiée en 2007, où la majorité des patients sont consommateurs de cocaïne base et 33 % sont sans domicile fixe. Alors que cela peut prendre plusieurs années pour qu’un sujet devienne dépendant à l’alcool ou aux benzodiazépines, la dépendance à la cocaïne s’installe classiquement plus rapidement. Cette maladie multifactorielle aux manifestations variables devient progressivement sévère surtout chez les sujets les plus vulnérables. Différentes phases Les différentes phases cliniques de l’addiction à la cocaïne s’inscrivent dans un cycle comprenant l’intoxication aiguë avec une euphorie, une dysrégulation hédonique (syndrome de sevrage avec manifestations psychologiques évoquant des symptômes dépressifs et manifestations physiques aspécifiques), un craving (déclenché par la cocaïne, les émotions positives ou négatives, l’environnement, le matériel habituellement utilisé pour consommer encore appelé cocaïne paraphernalia), la perte de contrôle avec un déficit de prise de décision, la recherche de produit avec de multiples prises de risque. L’évaluation clinique du patient doit comprendre de manière systématique les principaux antécédents personnels et familiaux, l’histoire de la consommation, l’âge de début des consommations, la fréquence, les quantités consommées (en g/semaine), les sommes dépensées, la principale voie d’administration et la nature de l’environnement. Il faut également repérer les conduites ou situations à risque (viral, sexuel…) et les conséquences et comorbidités psychiatriques, addictologiques et somatiques. Evaluation clinique Un examen clinique complet doit être réalisé et certains examens complémentaires doivent être prescrits de manière quasi systématique : bilan biologique, ECG, échographie cardiaque transthoracique, radiographie pulmonaire (si cocaïne fumée), examen ORL (si usage intranasal), sérologies hépatites B, C, VIH (avec accord du patient). D’autres examens seront à envisager en fonction des résultats de l’examen clinique. La cocaïne est pourvoyeuse de troubles cognitifs touchant les fonctions mnésiques, attentionnelles, et les fonctions exécutives comme la prise de décision. Ces altérations neuropsychologiques ont un retentissement direct sur l’observance thérapeutique. Il paraît donc nécessaire d’évaluer précocement ces fonctions neurocognitives à l’aide d’une batterie de tests spécifiques. Au cours de la prise en charge, différents facteurs doivent être évalués. Ils comprennent : - la réduction de la consommation (rapportée par le patient, tests urinaires), - le craving (échelle visuelle analogique, Cocaïne Craving Questionnaire…), - les symptômes de sevrage (questionnaire avec les différents symptômes), - la consommation d’alcool ou d’autres substances dans les trente derniers jours (rapportée par le patient, tests urinaires), - l’observance thérapeutique. Prise en charge L’alliance thérapeutique est à la base du programme thérapeutique structuré à proposer au patient demandeur de soins. Ce programme individuel et flexible a comme cibles thérapeutiques principales : bloquer l’euphorie, bloquer le craving, gérer le sevrage et atteindre l’abstinence en cocaïne. Différentes étapes cliniques à franchir par le patient peuvent être proposées : abstinence à 3 semaines, 3, 6, 9 et 12 mois. Ce programme combine différentes approches pharmacologiques et psychothérapeutiques aux différents stades de la prise en charge (phase de sevrage durant trois semaines et phase beaucoup plus longue de prévention de la rechute). Bien qu’aucun agent pharmacologique n’ait d’indication officielle dans l’addiction à la cocaïne, différentes pistes prometteuses ont émergé comme la N-acétylcystéine (tendance à la réduction du syndrome de sevrage?; réduction du craving)?; le topiramate* (réduction du craving, maintien d’abstinence)?; le disulfirame* chez les sujets dépendants à l’alcool et à la cocaïne (réduction de la consommation, du craving, de la dysphorie, maintien de l’abstinence) et le modafinil* (réduction de l’euphorie, du craving, maintien de l’abstinence). Ce dernier, piste thérapeutique forte, est contraint à des prescriptions restreintes en France (narcolepsie, hypersomnie idiopathique). Une étude d’imagerie cérébrale fonctionnelle évaluant son impact chez les sujets dépendants à la cocaïne a débuté dans notre centre en collaboration avec le CEA à Orsay et est actuellement en cours (Étude CAIMAN). L’approche psychothérapeutique sert de plateforme pour les pharmacothérapies, renforce l’abstinence, l’observance thérapeutique et l’action des médicaments. Différents types d’approche sont possibles : les entretiens motivationnels ne doivent être utilisés qu’au début de la prise en charge (phase de sevrage), la thérapie cognitive et comportementale est efficace pendant la seconde phase du traitement. L’approche psychodynamique peut être également une option.
Fermer Fermer
Article
L’addiction à la cocaïne et au crack, un problème qui s’aggrave , Quotidien du médecin (Le) , Vuaille B , 29/04/2009
Type Article
Titre L’addiction à la cocaïne et au crack, un problème qui s’aggrave
Source Quotidien du médecin (Le)
Auteurs Vuaille B
Date de parution 29/04/2009
Commentaire Globalement, l’addiction à la cocaïne est rapidement progressive à l’échelle de la planète, tout comme à l’échelon des individus. Elle comporte de graves conséquences médicales, psychiatriques et psychosociales et à ce jour aucun médicament n’a été officiellement approuvé pour traiter cette dépendance. Toutefois, comme la compréhension neurobiologique progresse, « on peut espérer la découverte de nouveaux médicaments prenant directement pour cible la pathologie biologique de cette addiction. » UN TABLEAU CLINIQUE d’allure maniaque, avec désinhibition, sensation de puissance intellectuelle et physique, euphorie, logorrhée, idées de grandeur, augmentation de l’énergie, de l’estime de soi, de l’activité motrice, de la libido, signes qui s’associent à une insomnie, une tachypsie et une tachycardie, doit évoquer une prise aiguë de cocaïne. À la période euphorique succède le syndrome de sevrage dont les manifestations à l’opposé (anhédonie, ralentissement psychomoteur…) conduisent à l’ardente envie de retrouver l’état antérieur et de reprendre le produit. La coca, d’où est extraite la cocaïne (alcaloïde) est cultivée principalement en Amérique du Sud (Colombie pour 61 %). La production mondiale augmente et l’Europe est la deuxième destination, avec ses 3,3 millions de consommateurs (6,5 millions en Amérique du Nord). Les saisies ont doublé entre 2005 et 2006, mais leur progression correspond pour une part malheureusement « à l’augmentation de l’offre de cocaïne sur le marché Européen ». Le crack correspond à de la cocaïne base, obtenue après adjonction de bicarbonate de soude. Le « niveau d’expérimentation », ou usage au moins une fois au cours de la vie, dans la population générale est le plus élevé parmi les produits illicites stimulants. Il a triplé entre 2000 et 2005, il atteint 2,6 % chez les personnes de 15 à 64 ans?; il est maximal chez les 25-34 ans : 4,1 %. La dépendance commence généralement par un simple usage récréatif, mais tend à dégénérer avec le temps vers un désordre invétéré de consommation à rechutes, d’une redoutable chronicité. Maladie du cerveau. On peut considérer cette addiction comme une véritable maladie du cerveau, que les progrès récents de l’imagerie cérébrale et de la biologie moléculaire permettent de mieux appréhender. En résumé, la cocaïne a des effets psychoactifs et addictifs en agissant essentiellement sur le système mésocorticolimbique cérébral, un ensemble de régions interconnectées qui a une action régulatrice sur le plaisir, la récompense et sur la motivation. La dopamine est le principal neuromédiateur, mais n’est pas le seul : sérotonine, noradrénaline. Par ailleurs, de vestes études épidémiologiques ont démontré que le risque de développer une addiction à la cocaïne ou à une autre drogue est en grande partie génétique, qui compte pour environ 50 %?; ce degré d’héritabilité dépasse largement celui de bien d’autres affections considérées comme hautement transmissibles (HTA, diabète de type 2…). À cela s’ajoute chez certains individus le facteur stress, dont le mode d’action demeure mystérieux. Le traitement de l’addiction à la cocaïne associe des moyens pharmacologiques et psychothérapeutiques, ces derniers étant très utilement combinés aux médicaments?; différentes formes de thérapies comportementales ont fait la preuve de leur efficacité. Quoiqu’aucun médicament n’ait été officiellement approuvé dans le traitement de cette dépendance, « les progrès des connaissances neurobiologiques ont permis d’identifier des médicaments dont les effets neurobiologiques suggèrent qu’ils seraient susceptibles d’aider les patients. Plusieurs de ces médicaments ont déjà donné des résultats dans des essais cliniques contrôlés ». On peut citer dans le traitement du sevrage : la N-acétylcystéine, le modafinil, le propranolol (hors AMM). Dans la prévention des rechutes, les médications prometteuses sont essentiellement les agents gabaergiques, le disulfirame, le modafinil et l’aripiprazole (hors AMM). Un « vaccin anticocaïne » est en cours d’évaluation chez l’homme.
Fermer Fermer
Article
Une étude relie cocaïne et anomalies dans le cerveau des foetus , Le Monde , Benkimoun P , 11/06/2008
Type Article
Titre Une étude relie cocaïne et anomalies dans le cerveau des foetus
Source Le Monde
Auteurs Benkimoun P
Date de parution 11/06/2008
Commentaire Une équipe de chercheurs des instituts nationaux de la santé (NIH) des Etats-Unis a découvert que les anomalies neurologiques et comportementales constatées chez des enfants dont la mère a consommé de la cocaïne pendant sa grossesse sont dues au stress oxydatif induit par cette drogue. Dans un article publié lundi 9 juin sur le site de la revue PLoS Medicine, Chung-Ting Lee et ses collègues précisent qu'un des produits du métabolisme de la cocaïne dans l'organisme interagit avec une protéine impliquée dans la division des cellules, perturbant ainsi le développement des neurones cérébraux. Chaque année aux Etats-Unis, plusieurs centaines de milliers d'enfants sont exposés à la cocaïne consommée par leur mère au cours de sa grossesse, indiquent les chercheurs des NIH. Cette exposition prénatale entraîne des anomalies du développement du système nerveux central, tout particulièrement si elle survient au cours du second trimestre de grossesse, au moment où les cellules précurseuses des neurones prolifèrent. Chung-Ting Lee et ses collègues ont découvert que la cocaïne pouvait provoquer la mort de neurones, mais aussi inhiber la prolifération des cellules nerveuses en bloquant leur cycle de division par le biais de la création de radicaux oxygénés libres. Ce phénomène s'explique par la diminution de l'expression du gène codant pour une protéine, la cycline A, dans les cellules qui donneront naissance aux neurones. Les chercheurs des NIH ont également montré que la restauration de l'expression de la cycline A par un médicament, la cimétidine, pouvait lever cette inhibition de la prolifération des cellules nerveuses. Dans un commentaire publié simultanément, Steven Hyman, professeur de neurobiologie à l'université Harvard, invite à garder la mesure devant cette publication en raison de "la complexité des facteurs pouvant contribuer aux anomalies cognitives et émotionnelles chez les enfants exposés à la cocaïne et à d'autres drogues dangereuses in utero". Neurobiologiste et professeur au Collège de France, Jean-Pol Tassin partage ce point de vue. Il souligne les limites de cette étude "très bien faite, mais correspondant à des situations extrêmes". Les cellules nerveuses y sont en effet exposées in vitro pendant des temps très longs, de plusieurs heures. De plus, "les doses de cimétidine requises pour bloquer l'effet de la cocaïne sur les neurones sont importantes, sans que l'on sache les effets secondaires qu'elles pourraient avoir chez le foetus", estime le professeur Tassin. Prudence, donc, avant d'étendre ces résultats aux situations de la vie réelle.
Fermer Fermer
Article
La cocaïne se démocratise en France et gagne du terrain sur le cannabis , Le Monde , 18/10/2006
Type Article
Titre La cocaïne se démocratise en France et gagne du terrain sur le cannabis
Source Le Monde
Date de parution 18/10/2006
Commentaire Les saisies de drogue ont globalement connu un léger tassement en 2005 (- 2,19 %), mais toutes les drogues ne sont pas logées à la même enseigne : le cannabis, longtemps le favori des trafiquants, perd du terrain (- 20 %), et la cocaïne poursuit son expansion en France. Selon le rapport de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS), rendu public mercredi 18 octobre, si les saisies sont en diminution, c'est grâce à une baisse du "deal de rue", où s'échange traditionnellement le cannabis. Une baisse que l'OCRTIS lie aux violences urbaines de novembre 2005 : les services de police et de gendarmerie étaient alors mobilisés dans les quartiers sensibles et ont ainsi "compliqué l'accès à certains lieux de transaction", souligne le rapport de l'OCRTIS. La "démocratisation" de la cocaïne est au centre de leurs préoccupations. Avec 5,185 tonnes, les saisies sont en progression de 16 % par rapport à 2004, qui constituait déjà un record. "Des réseaux de proximité sont maintenant 'au pied de l'immeuble' et cassent les prix", a expliqué le directeur de l'OCRTIS, Bernard Petit, lors d'une conférence de presse. "Il y a une pénétration plus profonde dans la société française qu'auparavant", a-t-il souligné. "DÉMOCRATISATION" Ce phénomène s'explique d'une part par l'intérêt accru des trafiquants des pays producteurs pour l'Union européenne, en raison de la saturation du marché américain, qui reçoit 600 des 900 à 1 000 tonnes produites chaque année. "Dans la zone euro, le prix – de 26 000 à 28 000 euros le kilo – est attractif", avance Bernard Petit. D'autre part, à partir de 2005, les bandes de moyenne envergure spécialisées dans le trafic de cannabis produit au Moyen-Orient et transitant par l'Espagne se sont réorientées vers la cocaïne, qui bénéficie d'un "effet de mode". Jusque-là, des petits trafiquants prenaient de gros risques en faisant acheminer le cannabis du sud de l'Espagne à bord de voitures puissantes selon la méthode du "go fast" – convoi de plusieurs voitures puissantes roulant à grande vitesse sur l'autoroute et forçant le passage aux péages. Désormais, ces trafiquants, à la tête de "réseaux de proximité" tissés initialement pour la revente de cannabis, se tournent vers la cocaïne, qui n'est plus seulement une drogue pour la jet-set. Pour s'approvisionner, ils paient des "mules", en provenance d'Amérique du Sud, qui dissimulent la drogue dans des valises ou ingèrent des préservatifs contenant de la cocaïne. Au printemps, vingt-deux Vénézuéliens qui avaient ainsi ingéré de la cocaïne ont été arrêtés par les douanes à leur descente d'avion à Roissy.
Fermer Fermer
Article
La consommation de cocaïne progresse en Europe , Le Monde , Smolar P , 13/10/2006
Type Article
Titre La consommation de cocaïne progresse en Europe
Source Le Monde
Auteurs Smolar P
Date de parution 13/10/2006
Commentaire La cocaïne rencontre un succès sans précédent en Europe, tandis que les saisies de cannabis enregistrent une baisse notoire pour la première fois depuis des années, selon un rapport de l'office central de répression des trafics illicites de stupéfiants (OCRTIS), dont Le Monde a eu connaissance. Datée du 27 juillet, cette note analyse l'évolution des trafics et met notamment en lumière la réorientation vers la cocaïne de trafiquants de moyenne envergure, issus des cités sensibles et jusque-là spécialisés dans le cannabis. Celui-ci reste le produit stupéfiant le plus prisé, mais l'approvisionnement se complique. En 2005, 831 tonnes de résine de cannabis ont été saisies dans les 25 pays de l'Union européenne, contre 1 045 en 2004. L'axe principal emprunté par les trafiquants, qui va du Maroc aux pays du Nord en passant par l'Espagne et la France, a fait l'objet d'une forte pression policière. L'offre marocaine serait en diminution de 10 % en 2005, selon l'office. Pour la première fois, en juin 2006, Rabat a ordonné l'éradication de cultures de cannabis dans douze communes du Rif. La sécheresse a aussi influé sur les rendements. "MARGE ATTRACTIVE" En France, note l'OCRTIS, "la hausse continue des saisies de résine de cannabis enregistrée depuis quinze ans s'est brutalement interrompue en 2005", en particulier dans la deuxième moitié de l'année. Les différents services concernés ont mis la main sur 86,5 tonnes, contre 107,7 en 2004. Cette tendance se confirme au premier semestre de cette année : 30 tonnes ont été saisies, contre 55 en 2005. "La France et l'Europe sont plutôt efficaces dans la lutte contre les stupéfiants, assure Bernard Petit, patron de l'office. Sur le continent, on intercepte 90 tonnes de cocaïne sur les 250 estimées à l'import, et 1 000 tonnes de cannabis sur 3 000. Ce n'est pas rien !" Les méthodes d'import sont variées. Le trafic par conteneurs et poids lourds, surtout à destination de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas, est difficile à déjouer. L'échelon intermédiaire des trafics, lui, est composé d'individus important entre 15 kg et 100 kg de résine en provenance du Maroc, dissimulés dans des véhicules de tourisme. Ils appartiennent rarement à des organisations criminelles structurées et se font souvent arrêter à Tanger. En revanche, d'autres malfaiteurs plus redoutables utilisent la technique du "go fast". Elle consiste à mobiliser plusieurs voitures, roulant en convoi à grande vitesse, de préférence la nuit sur autoroute. En 2005, huit réseaux de ce genre ont été démantelés en France. Tenant compte de la réponse policière, certains trafiquants ont décidé d'adapter cette méthode à la conduite de jour, à vitesse plus réduite, pour se fondre dans le trafic routier. C'est cette même capacité d'adaptation qui a poussé des malfrats issus des cités à délaisser le cannabis au profit de la cocaïne. Ce phénomène explique la hausse des saisies en France, pays servant surtout de transit : près de 5,2 tonnes en 2005, soit 16 % de hausse par rapport à l'année précédente. Le nombre d'usagers de cocaïne interpellés par les forces de l'ordre a aussi augmenté de 14,20 % (2 807 personnes). "On note une augmentation incontestable de la consommation de cocaïne, explique le docteur Frédéric Rouillon, président du conseil d'administration de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). On a longtemps opposé les drogues stimulantes comme la cocaïne, prisées aux Etats-Unis, aux drogues sédatives, comme l'héroïne, très présentes en Europe. Le phénomène de mode autour de la cocaïne a largement entamé cette distinction." L'héroïne, toutefois, enregistre une hausse très impressionnante : près de 750 kg, soit + 34 % par rapport à 2004. La reprise massive de la production en Afghanistan n'y est pas étrangère. L'essor de la cocaïne intervient en dépit de la pression accrue sur les grands réseaux, dirigés par les cartels, et des progrès de la coopération policière internationale. Elle correspond à une réorientation des trafics vers l'Europe. "Les trafiquants colombiens ont eu un vrai débat il y a cinq ans, explique M. Petit. Ils avaient le choix entre se concentrer sur l'Amérique du Sud ou l'Europe. L'Amérique du Sud, c'est des frontières poreuses, une forte corruption, de nombreux consommateurs, mais aussi un faible prix de vente. L'Europe, elle, nécessite une logistique pour le transport, les peines sont fortes, mais en revanche, la marge est très attractive." Les trafiquants obtiennent un kilo de cocaïne pour environ 300 ou 400 euros, puis le revendent en Europe entre 24 000 et 40 000 euros, selon l'Ocrtis. Issus des banlieues, les nouveaux trafiquants ne disposent pas des mêmes moyens logistiques que les cartels, mais ils ont des idées. Ils achètent souvent la cocaïne au Venezuela, en Colombie ou au Brésil et utilisent des porteurs pour les acheminer en France, rémunérés 1 000 euros le passage. Ils profitent aussi des marges du marché national. En Guadeloupe et en Martinique, 2 kg de résine s'échangent contre 2 kg de cocaïne, une équivalence exceptionnelle qui permet de dégager des bénéfices importants. Piotr Smolar -------------------------------------------------------------------------------- CHIFFRES SAISIES. 86,6 tonnes de résine de cannabis saisies en France en 2005, après quatre années de hausse : 107,47 tonnes en 2004 ; 82,6 en 2003 ; 57,1 en 2002. Les saisies de cocaïne sont en hausse constante depuis 2001 : 5,18 tonnes saisies en 2005 contre 4,48 en 2004. PRIX sur le marché français. 1 kg de cocaïne : de 27 000 à 40 000 euros. 1 kg d'herbe de cannabis : de 2 100 à 4 000 euros. 1 kg de résine de cannabis : de 1 300 à 2 000 euros. 1 kg d'héroïne blanche : de 20 000 à 40 000 euros. (Source : Ocrtis.)
Fermer Fermer
Article
L'ONU dénonce la consommation de cocaïne en Europe , Le Monde , 27/06/2006
Type Article
Titre L'ONU dénonce la consommation de cocaïne en Europe
Source Le Monde
Date de parution 27/06/2006
Commentaire La consommation de cocaïne en Europe occidentale atteint des niveaux alarmants, selon le rapport 2006 de l'Agence des Nations unies contre la drogue et le crime (Unodc) publié lundi 26 juin à Washington. "J'exhorte les gouvernements de l'Union européenne à ne pas ignorer ce péril", a déclaré le directeur exécutif de l'agence, Antonio Maria Costa, en présentant le rapport. "Trop de cadres, d'Européens éduqués prennent de la cocaïne, souvent en niant qu'ils sont dépendants", a-t-il regretté. Il a en outre mis en cause les médias qui sont complaisants avec les vedettes du show-biz qui prennent de la drogue et qui laissent les jeunes "troublés et vulnérables". En revanche, après des années d'expansion, le marché des stimulants est en déclin, selon M. Costa. Environ 25 millions de personnes ont pris au moins une fois des amphétamines en 2004 tandis que 10 millions prenaient de l'ecstasy. LE CANNABIS N'EST PAS UNE DROGUE "DOUCE" La drogue la plus répandue dans le monde demeure le cannabis. En 2004, environ 162 millions de personnes ont fumé du cannabis au moins une fois, soit 4 % de la population mondiale âgée de 15 à 64 ans. Et la consommation continue d'augmenter. Or, a dit M. Costa, le cannabis est beaucoup plus puissant aujourd'hui qu'il y a quelques dizaines d'années. Selon lui, c'est une erreur de croire qu'il s'agit d'une drogue "douce". Il a donc plaidé pour que les Etats suivent des politiques sans complaisance vis-à-vis des drogues, concluant que "beaucoup de pays ont le problème de drogue qu'ils méritent". Globalement, "le contrôle du trafic de drogue fonctionne et le problème mondial de la drogue est circonscrit", s'est cependant félicité M. Costa.
Fermer Fermer
Article
La cocaïne au quotidien , Le Monde , Eudes Yves , 13/04/2006
Type Article
Titre La cocaïne au quotidien
Source Le Monde
Auteurs Eudes Yves
Date de parution 13/04/2006
Commentaire C'est un bar-restaurant parisien, très connu, mais ni trop branché ni trop cher. Ce soir, l'orchestre est déchaîné, l'ambiance joyeuse, la clientèle diverse, avec une majorité de trentenaires décontractés. Sur la porte des toilettes, on a vissé une petite pancarte : "Ne pas s'attarder, merci." Quand on demande une explication aux barmen, ils font des réponses humoristiques ou incompréhensibles. Côté clients, le message est reçu : "Ils ont mis ça pour qu'on arrête de "taper" (prendre de la cocaïne). Ou alors pour qu'on fasse vite." Au centre de la salle, une tablée d'une dizaine de jeunes bien habillés fait beaucoup de bruit. Les garçons surtout ont l'air surexcités, ils dansent sur place, rient très fort, rivalisent d'éloquence jusqu'au délire et dévisagent les filles avec des airs conquérants. Ils ont pris de la cocaïne avant d'arriver, et vont en reprendre régulièrement jusqu'au petit matin. Plutôt que de faire la queue aux toilettes, ils envahissent un petit local servant de remise, avec la complicité d'un serveur. Les clients de la table voisine, qui ont observé la manoeuvre, ne semblent pas s'en préoccuper... Selon les statistiques publiées par les Observatoires français et européen des drogues et toxicomanies (OFDT et OEDT), les Français consommeraient peu de cocaïne comparés aux autres Européens - quatre fois moins par exemple que les Britanniques ou les Espagnols. En France, la cocaïne fut longtemps une drogue chic, présente dans les milieux littéraires et artistiques, le show-business, les médias, la publicité ou la mode. Or cette exception française est en train de se résorber. A la faveur du mouvement techno des années 1990, la cocaïne s'est répandue dans le pays : un sondage effectué en 2004 dans cinq villes de province indique que plus de 81 % des jeunes fréquentant des rave-parties auraient goûté à la cocaïne au moins une fois. Au sein de la population générale, les chiffres sont moins spectaculaires, mais en constante augmentation. En 1993, à peine 1,2 % des 18-44 ans déclaraient avoir essayé la cocaïne. En 2003, ils étaient 3,3 %. A noter que ces pourcentages sont sans doute plus élevés dans les classes moyennes supérieures, ainsi que chez les hommes, car les femmes semblent moins attirées par cette drogue. En 2005, l'OFDT constatait que "les milieux sociaux concernés par cette consommation sont devenus tellement larges et hétérogènes qu'il est difficile aujourd'hui de dresser un portrait type du consommateur". De fait, il suffit de vivre un peu la nuit à Paris pour s'apercevoir que la consommation de cocaïne augmente fortement et régulièrement. Il est de plus en plus facile de s'en procurer, et les prix baissent : 50 à 70 euros le gramme (suffisant pour faire la fête toute la nuit), et seulement 20 euros pour un "trait" (dose individuelle) acheté en discothèque à un dealer de passage ou à un fêtard prêt à dépanner un nouvel ami. A., 25 ans, a grandi dans une ville cossue de la banlieue ouest, et mène aujourd'hui une vie agréable dans le studio parisien offert par ses parents. Grâce à ses contacts familiaux, il enchaîne les emplois précaires mais bien payés. Il prend de la cocaïne avec une totale insouciance : "Une soirée sous coke, ça n'a rien à voir avec une soirée où il y a seulement de l'alcool. L'ambiance est meilleure, les gens sont plus ouverts, ils ont le goût de l'action (...). Mais en même temps, avec la coke, tu gardes les pieds sur terre, pas comme avec la vodka ou le cannabis. Je peux conduire, rester concentré, et même bavarder avec ma mère ou mon boss, ils ne verront rien." C'est lui qui se charge de fournir en cocaïne sa bande de copains. Il l'achète par l'intermédiaire d'un ami de son frère aîné, 40 ans, employé de banque. Leur dealer est un barman, qui se vante d'avoir gagné assez d'argent avec la cocaïne pour pouvoir bientôt s'acheter un restaurant. Il reçoit ses clients ordinaires dans son bar, et les privilégiés chez lui. Si malgré tout la cocaïne vient à manquer en cours de soirée, A. et ses amis ont recours à des vendeurs ambulants : "On les appelle sur un portable, et ils arrivent à Mobylette, comme les livreurs de pizza. Ils livrent partout, nuit et jour, même dans les bureaux." La cloison entre vie privée et vie professionnelle n'est pas étanche. Après avoir découvert la cocaïne pendant des vacances en Espagne, A. a décroché un stage dans une entreprise parisienne de l'industrie musicale : "Dans les coulisses, en studio, à la buvette, personne ne se cache pour se faire un trait, c'est complètement ouvert. Ça crée des habitudes." Son ami D., 23 ans, diplômé d'une école de commerce, habite encore chez ses parents. Il consomme de la cocaïne depuis l'âge de 20 ans, car elle circulait dans son école : "Quand on avait prévu une fête pour le soir, on commençait à sniffer dans l'après-midi, avant le dernier cours, pour être sûrs d'avoir la pêche dès le début de la soirée." Pendant ses études, D. a fait un stage dans une station de radio : "J'ai sympathisé avec l'équipe commerciale et, un soir, ils m'ont invité à sortir en boîte. Et là, j'ai découvert qu'ils étaient tous très friands de coke ; pour eux, c'était passé dans les moeurs (...). C'est sûr que si tu en prends trop, ça attaque le nez, tu ne dors plus, mais pour moi, c'est un truc de jeunesse, je sais qu'un jour je m'en lasserai, il n'y a pas d'accoutumance physique." L'insouciance juvénile d'A. et de ses copains n'est pas partagée par les trentenaires qui se débattent avec la cocaïne depuis des années. C., 35 ans, décoratrice, avoue sans détour qu'elle est dépendante : "Je suis timide mais je refuse de l'admettre, alors la coke aide. Et surtout je m'ennuie facilement, le monde tel qu'il est ne me suffit pas, j'ai besoin de me raconter une autre histoire." Ces temps-ci, elle consomme régulièrement : "Quand tu es une grande blonde plutôt jolie, tu n'as pas besoin d'en chercher, on t'en offre sans arrêt. Et c'est de plus en plus souvent, j'ai l'impression que, depuis un an, tout le monde en a. Hier encore, je suis allée voir un collègue, genre sérieux, rangé. Quand je suis arrivée chez lui, il y avait de la coke qui traînait, et voilà. Cela dit, j'aime être indépendante dans ma consommation, alors j'en achète parfois. Enfin, souvent." La cocaïne s'est installée dans tous les aspects de sa vie, y compris au travail : "Ceux qui consomment au boulot savent que c'est pour compenser une faiblesse, c'est dévalorisant de l'avouer. Au début, tu te fais un trait par ci par là, parce qu'il t'en reste de la veille et que tu piques du nez après une nuit blanche, et après, c'est parti. Ça peut être le matin avant de partir, dans les toilettes du bureau après le déjeuner ou avant un rendez-vous important. En une seconde, tu te sens fort, motivé, sûr de toi, capable de tout gérer. Si c'est un travail physique, tu es plus puissant et plus précis dans tes gestes. Autour de toi, tout le monde a l'impression que tu assures. Le résultat n'est pas forcément meilleur, mais le boulot est fait, et il a semblé moins pénible." Pourtant C. a vite compris le revers de la médaille en voyant ses collègues, ses patrons ou ses clients sous l'emprise de la cocaïne : "Les effets négatifs, on ne les voit pas sur soi, mais sur les autres, c'est criant. Un type sous coke se met à raisonner en boucle, il devient lourdingue. Il est de plus en plus surexcité, impatient. Hyper-sensible aussi, un rien l'agace. Puis il devient arrogant, parano, agressif. Il a toujours raison, les autres sont des cons, point." La dépendance psychologique s'installe rapidement : "Dès que tu arrêtes, tu te sens nul, incapable, tu n'as plus envie de rien. La descente est dure et triste. La seule solution, c'est d'en reprendre." L'abus prolongé a failli créer un drame dans la vie de C. : "Avec un ami, je me suis retrouvée avec un énorme boulot, et un délai de trois jours. On a tout fait sous coke, sans dormir pendant soixante-douze heures. Le boulot a été fini dans les temps, mais, juste après, mon ami est rentré en voiture, il s'est évanoui au volant, et il s'est réveillé à l'hôpital, assez amoché. Moi, j'ai fait une crise de délire, ensuite j'ai dormi deux jours, et j'ai mis une semaine pour récupérer." Ce type de comportement semble se banaliser. Le docteur Michel Hautefeuille, psychiatre au centre Marmottan, dans le 17e arrondissement, spécialisé dans le traitement des toxicomanes, a récemment découvert un nouveau type de patients : "Je reçois des gens qui prennent de la cocaïne dans leur entreprise. Ils s'en servent comme stimulant pour travailler plus dur, pour faire face à la concurrence de leurs collègues. Ce sont des dopés du travail, leur motivation est la même que celle des sportifs qui prennent de l'EPO. Ceux qui veulent arrêter ont besoin d'aide." Il est convaincu que c'est une tendance lourde : "En France, la drogue a longtemps été considérée comme un produit planant, extatique, contemplatif. En revanche, les Américains ont toujours recherché des drogues excitantes, permettant de se surpasser. L'arrivée massive de la cocaïne chez nous est un symptôme de l'américanisation de la vieille Europe. On ne se drogue plus pour être rebelle ou original, mais pour se conformer au modèle du cadre éternellement jeune, infatigable, débordant d'idées." Un cadre supérieur travaillant dans une tour de la Défense arrive à Marmottan en fin de matinée, avec son costume de luxe et son attaché-case en cuir : "L'autre jour, se souvient le docteur Hautefeuille, il est entré et m'a dit : "J'ai vingt minutes pour ma consultation, je sors d'un conseil d'administration et je prends l'avion dans deux heures."" Cela dit, il est temps pour lui de se soigner car la paranoïa le gagne : "Pour venir, il a fait un grand détour, a garé sa voiture dans un autre quartier et a fini le trajet en métro." Dans le centre de soins, il exige l'anonymat complet, entre et sort par une porte dérobée, et refuse de s'asseoir dans la salle d'attente avec les autres patients. Le docteur Hautefeuille accueille aussi des petits employés : "J'ai compris que la cocaïne avait changé d'image le jour où j'ai vu arriver un postier de 32 ans qui prend de la cocaïne au travail. Ce n'est pas un ancien teufeur (fêtard en verlan), il ne se drogue pas le soir ni le week-end." Dans son bureau de poste parisien, le jeune homme a le sentiment de vivre un enfer. Suite à des compressions de personnel, il n'y a plus que deux guichets ouverts en permanence, au lieu de quatre. Résultat : les clients piétinent, deviennent agressifs. Face à ce stress imprévu, l'employé se sent inapte, impuissant et, pour lutter contre son mal-être, il se drogue. Tout commence quand il va se plaindre de ses angoisses à son médecin de quartier, qui lui prescrit des antidépresseurs et des somnifères. Puis, voyant que son état empire, il décide de dépasser les doses prescrites et de faire des cocktails de médicaments : "Peu à peu, se souvient le docteur Hautefeuille, il découvre les limites des drogues légales et, à l'occasion d'une rencontre fortuite, il passe à la cocaïne, qui se révèle bien plus efficace." Un jour, il s'aperçoit que, quand il n'en a pas, il ne pense qu'à ça. Tout en aidant le postier à arrêter la cocaïne, le docteur Hautefeuille l'a incité à se présenter à un concours interne, afin d'obtenir un poste plus tranquille, loin du guichet : "Il a surtout un problème d'adaptation au sein de l'entreprise. S'il réussit son concours, il s'en sortira. Sinon..." Reste à savoir comment un simple citoyen, qui n'a pas de copains dans le show-business ou la haute couture, se procure de la cocaïne régulièrement et sans risque. Apparemment, c'est un faux problème : "Il y a un quartier HLM tout près d'ici, il suffit d'y aller, pas besoin d'être introduit, on est accosté, indique le docteur Hautefeuille. On peut aussi aller à la Cité universitaire, c'est un vrai supermarché." Il reçoit des enseignants mal aimés, des représentants payés uniquement à la commission, des patrons de PME en difficulté, des techniciens aux horaires décalés, des quadras menacés de licenciement : "Souvent des gens rangés, conformistes, respectueux de la loi, aux antipodes du cocaïnomane de jadis." Le psychiatre Philippe-Jean Parquet, chef du service d'addictologie du CHU de Lille, fait les mêmes constatations : "Les Français ont entamé un processus de fraternisation intellectuelle avec la cocaïne. L'idée se répand que, si on est initié, on pourra la maîtriser. Cette banalisation est regrettable ; on sous-estime ses effets destructeurs irréversibles sur le cerveau." L'un de ses patients est un courtier en Bourse de 38 ans, qui passe parfois deux jours et deux nuits devant son écran et doit prendre des décisions instantanées dans une frénésie permanente. Pour durer dans son métier, il a recours à la cocaïne, mais, craignant de devenir toxicomane, il est venu voir le docteur Parquet avec une demande originale : "Il veut continuer à en prendre au travail, ce qu'il appelle sa "consommation de nécessité", et s'en passer pendant son temps libre." Le médecin a estimé qu'il devait répondre à cette demande : "Nous avons établi ensemble des règles de consommation, avec des plages d'abstinence à certains moments stratégiques. C'est un homme qui n'a pas d'autre vulnérabilité, cette discipline fonctionne. Ensuite, je l'ai poussé à faire une évaluation de son travail, pour déterminer si la cocaïne avait réellement accru ses performances." Le courtier s'est aperçu que, dans un premier temps, la cocaïne avait été efficace, mais que, par la suite, sa courbe de performances s'était inversée, il ne prenait plus le temps de la réflexion, ce qui aboutissait à des erreurs de jugement coûteuses : "Si on arrive à les convaincre qu'ils ne deviendront pas riches de cette façon, tous les espoirs sont permis. Mais ce n'est pas gagné."
Fermer Fermer
Article
L'univers de la drogue , Aide soignante (L') , 44 , Guégan O , 01/02/2003
Type Article
Titre L'univers de la drogue
Source Aide soignante (L')
44
Auteurs Guégan O
Date de parution 01/02/2003
Commentaire Quelques géénralités sur la drogue p. 10 Drogues : les produits p. 12 Cannabis "récréatif" plus que médical p. 14 Un témoignage sans concession p. 17
Fermer Fermer

Connexion

Identifiant
Mot de passe

Catégorisation par Type

A la semaine prochaine !