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Fonds documentaire : Article
Titre Abus de pouvoir
Source Quotidien du médecin (Le)
Auteurs Baudrier F
Date de parution 01/10/2004
Commentaire A la violence réelle ou perçue des patients répond bien trop souvent encore la violence de certains soignants, le plus souvent pourtant sans réelle intention de nuire. LA LITTERATURE abonde pour dénoncer les maltraitances du personnel soignant - pas seulement dans les journaux - et malgré le silence relatif sur le sujet, les médecins n'en sont pas exempts. On parle de maltraitance lorsqu'il y a « association de maltraitances », précise Françoise Busby, directrice de l'association Alma*. Il ne s'agit donc pas d'un acte isolé, d'un « pétage de plombs », mais bien d'une répétition de gestes volontaires ou non qui conduisent à violer, au sens premier du terme, la personne dans son intégrité physique ou morale. Une violence multiforme. Certaines violences sont caractérisées : il s'agit de violences physiques (coups, actes brutaux) ou d'abus manifestes (signature forcée de documents, extorsion de fonds). D'autres le sont moins, comme le manque de respect (« Et comment elle va la mamie ? ») ou les menaces à peine voilées (« Si vous ne faites pas ça, je dirai à votre fille de ne pas venir »). Dans le domaine des soins, l'accumulation des négligences conduit à la maltraitance : ce sont les couches qu'on ne change pas par manque de temps, ou au contraire la personne à qui on met des garnitures pour éviter de la déplacer aux WC ; ce sont les patients gavés, parfois avec des aliments uniquement sucrés parce qu'ils les ingèrent plus rapidement, habillés à la va-vite, toilettés à la chaîne, déplacés sans leur consentement ; ce sont les contentions injustifiées, les actes intrusifs et non expliqués, le non-respect de l'intimité, les gestes empreints de brutalité. Plus compliquées encore à déceler, les maltraitances médicales n'en sont pas moins d'authentiques violences. Certains patients sont abrutis de neuroleptiques, de médicaments « qui donnent du temps à tout le monde et libèrent de la responsabilité en cas de chute », explique Françoise Busby. D'autres au contraire, sous prétexte qu'ils se « plaignent tout le temps », se voient refuser des traitements contre la douleur, ou bien leurs prescriptions ne sont pas exécutées en temps voulu. De nombreux patients vivent très mal l'attitude intrusive, voire dictatoriale de certains soignants : des personnes âgées n'ont pas le droit de se donner la main sous prétexte que « cela ne se fait pas » ; des enfants en souffrance ne ne sont pas autorisés à voir leurs parents parce que le service ne veut pas être dérangé ; des patients en consultation sont culpabilisés, examinés sans respect pour leur pudeur, alors que quelques mots suffiraient pour humaniser la rencontre soignant-soigné. Apprendre à communiquer. « Quatre-vingt-dix pour cent des situations que nous rencontrons sont liées à un manque de communication », estime Françoise Busby. L'enchaînement n'est malheureusement que trop bien connu : le soignant qui se démène dans son travail a l'impression de donner beaucoup, s'épuise dans un cadre peu gratifiant et ne rencontre que l'agressivité d'un patient douloureux, épuisé lui aussi mais pour d'autres raisons. Les réactions des soignants sont alors une défense dans un contexte de burn-out parfois latent, mais qui ne trouve pas de limite du fait de la position toute puissante. Les psychologues parlent de « formation réactionnelle » : plus on est agacé, plus on culpabilise, plus on en fait pour compenser ; et quand on est trop pris dans un affect qui nous déplaît, on le retourne en son contraire. Ainsi cet infirmier aux urgences qui utilise des cathéters trois fois trop gros pour « calmer » les patients récalcitrants ; ou cet interne en gynécologie qui, lors d'une garde, prescrit double dose de pilule abortive à une patiente, bien qu'il soit pleinement conscient des effets secondaires, « pour qu'elle s'en souvienne ». Selon Françoise Busby, il suffit parfois de prendre le temps de dire : « Je suis de mauvaise humeur aujourd'hui, j'ai mal dormi, ne vous formalisez pas », pour que, simultanément, l'agressivité diminue et que le seuil de tolérance du patient augmente de façon significative. « Parmi les éléments forts sont les habitudes dans lesquelles s'enferment aussi les soignants : il faut se remettre en question, raisonner au cas par cas, retrouver la personne derrière la personne âgée », ajoute Mme Busby, qui, tout en insistant sur la distance professionnelle, estime qu'il peut être utile de se demander si on traiterait de la même façon son père ou sa grand-mère. Introduire ce questionnement dans un cadre où l'on est souvent isolé (surtout dans les services de nuit ou en libéral) n'est pas toujours facile. De ce point de vue, le travail en réseau, la communication avec l'ensemble des professionnels impliqués - y compris les aides-ménagères, qui en savent parfois long sur le patient - est essentielle. Cela peut être simplement, comme le souligne l'ethno-anthropologue Anne Véga, passer un coup de fil à un collègue en sortant de consultation pour « vider son sac » au lieu d'accumuler les tensions. Le soignant doit également apprendre à dire non, se faire respecter et ne pas accepter insultes ou marques d'irrespect du patient ou de la famille. Et quand cela ne suffit pas, il ne faut pas hésiter à passer le relais et à parler en groupe des dérapages, qu'on en soit l'auteur ou non. La maltraitance est punie par le code pénal et le signalement est obligatoire, l'accord de la victime permettant de se délivrer du secret professionnel (code pénal, articles 222-14, 434-3, 314-1, 223-15-2, 226-13 et 226-14).
Mots-clés VIOLENCE / RELATION INTERPERSONNELLE / RELATION SOIGNANT/SOIGNE
Langue Français
URL http://www.quotimed.com

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