Le regard que porte la société sur les troubles psychiques a beaucoup évolué ces 20 dernières années : le stress, la dépression sont reconnus et acceptés comme pathologies “nobles”, l’addiction, la consommation de certains médicaments interférant les troubles de l’humeur sont mieux acceptés.
Restent les nombreuses pathologies que l’on continue à occulter, tous les troubles psychotiques induisant des comportements violents, dans lesquelles on a tendance à juxtaposer, pêle-mêle, les psychoses et les pathologies invalidantes provoquant des conduites “hors normes”. Ces pathologies sont tues par l’entourage familial, mais font parfois la une des médias : faits divers virulents, mettant à l’index la psychiatrie et les malades atteints de troubles psychiques, induisant alors un réflexe de rejet de tout un système.
Pourtant, en France, depuis 1985, le développement de la sectorisation et l’ouverture de structures extra-hospitalières ont permis de réduire de moitié le nombre de lits d’hospitalisation et de diminuer de 400 % la durée des séjours. Le traitement précoce du malade dans son cadre de vie privé, familial et social, par une équipe de secteur pluridisciplinaire médicale et soignante, est le credo de la pratique. À cette prise en charge, s’associent différents partenaires : partenaires de soins dans la cité, acteurs sociaux, pouvoirs publics, justice, commune, associations…
Si l’organisation de la prise en charge d’un malade atteint de troubles psychiques et l’accompagnement des familles sont peu connus de la population, on entre dans un véritable labyrinthe quand il s’agit de comprendre l’articulation entre ces différents acteurs.
Chacun connaît les difficultés que peut rencontrer un patient traité pour une pathologie relevant des soins généraux. Le terme “patient” prend alors sa véritable étymologie, car il a bien du “mal” à s’y retrouver entre les différents services qu’il doit contacter, à réaliser une articulation entre eux et sa maladie, ou tout simplement à donner du sens à l’ensemble de cette prise en charge qui peut lui paraître éclatée. À ce titre, l’inscription de la prise en charge du patient atteint de pathologie psychique, donc souffrant de troubles de santé multiples et complexes, nécessite la définition des rôles et des actions de chacun, ainsi que l’organisation d’outils de communication de l’information fiable, respectant le secret de vie la privée.
Différentes expériences professionnelles nous montrent non seulement les questionnements et réflexions des équipes soignantes et des autres partenaires, mais aussi certaines pratiques menées par ces professionnels de divers horizons dont l’objectif commun est de participer à l’élaboration d’un système de prise en charge cohérent du patient et de son entourage familial.
Un système d’accompagnement doit être centré sur une articulation de la prise en charge holistique associant, certes, les soins psychiques et somatiques, mais aussi un accompagnement dans un parcours de soins et de vie. Mais ce parcours de vie liant les soins, les ressources, le logement, le travail, doit être centré sur un sujet singulier, dans une véritable éthique, avec tout le respect de la dignité du citoyen qu’il est.
Lucien Bonnafé disait : « Une société se juge à la manière dont elle traite ses fous ! »
